La décolonisation du programme de Français

Par Caroline Keller, 12e

Le département du français est quelque chose qu’on fait face avec dès le premier moment qu’on rentre dans l’école secondaire. On connaît bien sûr quelques profs, certains sont plus notoires que d’autres. Mais une chose a changé cette année, et c’est le nom de ce département. On dit bienvenue au “Département de Langue et Littératures en Français”. On peut voir ce changement de nom si on regarde de près à gauche des salles de bains au deuxième étage du Grand bâtiment. Pour cet article nous avons interviewé 3 professeurs du département.

La première question notamment est pourquoi ce changement de nom? Cela est notamment dû au changement d’attitude dans l’école dû aux décolonisations du programme. Cette initiative a été commencée par Dr. Hughes mais le changement du nom a été proposé en interne. Les professeurs de cette école sont pour la décolonisation et certains font des recherches en dehors de l’école dans de tels sujets. Donc ce changement de nom était de la part des professeurs non par l’administration de l’école. C’était aussi une chose qui n’a pas été discutée beaucoup auparavant et plutôt imposée sur les professeurs qui ne faisaient pas partie des professeures qui font des études en dehors de l’environnement de l’école. 

Mais alors d’où est venue cette initiative? Ce changement n’était pas un objectif au début de cette année mais plutôt une prise de conscience de la part du groupe de professeures mentionné auparavant et du département. L’école en tant qu’administration au cours des dernières semaines commence à se poser des questions d’inclusivité dans les divers départements de l’école. Le groupe de professeures qui étaient mentionnés à également posté sur des plates-formes informatiques comment enseigner le français d’une manière plus ouverte à la diversité dans l’avenir proche. L’origine de l’idée semble être là. Le département de français, a pour un moment réfléchi à comment ils pouvaient être plus inclusifs et ils voulaient démontrer cela à travers ce changement de nom. 

Ensuite, nous avons demandé s’il y avait d’autres choix de noms? La simple réponse était oui. Il eut un email envoyé aux professeurs du département de la part d’autres professeurs du département et ils tuent le choix entre 1. Département de Français; 2. Département de Langue et Littératures Francophone; 3. Département de Langue et Littératures en Français. Quelles sont les différences entre ces choix alors? Le premier choix serait de ne pas changer le nom. Les deux autres sont très proches mais veulent dire deux choses très différentes. En utilisant le mot “francophone” cela connote en même temps un côté juridique qui n’était pas le sentiment qu’ils voulaient transmettre mais aussi que la littérature en dehors de la France Métropolitaine. En disant “en français” ça créait aussi une sorte d’égalité entre le français parlé au Congo, à Genève, ou à Paris. Mais alors pourquoi avoir littérature au pluriel? Cela est parce que ça incorpore toutes les littératures et donc aussi les littératures des colonies comme celles d’Haïti, du Congo, mais aussi les pays qui parlent le français comme ici en Suisse, la Belgique et d’autres pays. Même si on pourrait dire que la littérature au singulier et le concept et donc ne discriminent aucun pays, cela était un choix de la part du département. Le choix en elle-même ne portait pas sur l’idée mais sur la formulation, donc préférablement de la stylistique au lieu de la philosophie. Le changement de nom du département nous amène à questionner la réflexion de la part des autres départements de langues comme le département d’anglais et le département de langues. Il faut penser à quel point nous privilégions une littérature plus qu’une autre.

On a continué en posant la question de si l’administration a changé la manière dont il communique avec le département dû au changement de nom. La réponse est pas du tout, car l’administration n’est toujours pas au courant de ce changement. Le seul changement est la banderole dans le couloir. Mais dès la rentrée de l’année prochaine, on va commencer à voir ces changements. Premièrement avec le site web du département, où ils vont changer de nom. Puis le changement va probablement se faire sur l’annuaire téléphonique. Avec ces petits changements, c’est à ce moment qu’on verrait les réactions. Par l’opinion d’un enseignant, le département est positif dans leurs espérances que l’administration va leur soutenir car l’idée est acheminée au cœur de leur valeurs et préoccupations de l’ouverture et la réflexion du programme et de leurs étudiants. Personne ne peut prévoir l’avenir mais la question a quand même été posée de s’ils croient que les réactions de la part des enseignants, des parents et des étudiants vont être positives. La question centrale va probablement être “pourquoi la littérature au pluriel?”. Comme dit auparavant la littérature peut-être un concept mais au pluriel ça introduit les approches littéraires globales et générales mais aussi la manière dont différentes cultures s’expriment dans la langue française.  

Bien sûr nous voulons savoir si le nom va changer à nouveau dans le proche futur. Cette idée n’est pas exclue car tout peut évoluer mais il y a un certain nombre de choses qui vont devoir être remis en question de nouveau. Le nom actuel semble agréger tous les niveaux des étudiants français, mais aussi la façon dont ils étudient. Du niveau débutant jusqu’à la langue maternelle et aussi au niveau du BI le choix entre Français A littérature et Français A langue et littérature. 

En se concentrant davantage sur les étudiants, le programme changera-t-il pour eux et comment ce changement de nom les affectera-t-il directement? Premièrement, le programme du BI va probablement ne pas changer car c’est une institution internationale. En prenant compte que notre école a fondé le BI, cela ne veut pas dire que les initiatives prises dans notre école sont répandues sur les autres écoles qui offrent le BI en tant que diplôme. Toutefois, les professeurs qui enseignent le BI ont beaucoup de liberté avec leurs choix d’œuvres à étudier. Donc c’est le choix individuel des professeurs mais aussi des étudiants qui sont dans la classe. Mais pour les classes qui ne font pas le BI cette année ou l’année prochaine sentiront forcément les conséquences, bonnes ou mauvaises, de ce changement.  L’idée est d’introduire systématiquement, dans les classes A et les classes avancées (qui ont accès aux œuvres littéraires), des œuvres qui sont l’image de cette diversité (des textes qui ne sont pas originaires de la France Métropolitaine). Il y a aussi le côté des enseignants qui veulent montrer qu’on parle de différents français dans différents endroits. Par exemple en Suisse nous disons septante mais en France on dit soixante-dix. Mais ça va plus loin même si en Suisse on dit natel, au Canada on dit un cellulaire, en France on dit téléphone. Depuis le début de ce département, ils essayent d’introduire au moins un auteur d’origine Suisse car on y vit tous, mais ce changement incorporera également les auteurs d’origine Africaine ou Sud Américaine. Un des interviewés pense que même si à ce moment on étudie probablement une poignée d’auteurs africains, on devrait aller plus loin et étudier des œuvres qui sont écrites par des auteurs moins célèbres et moins reconnus mondialement. Cela, donc, changera définitivement le contenu du programme mais pas nécessairement la manière dont les professeurs enseignent. 

Il y a en même temps une crainte, que même si l’Ecolint est une école plutôt ouverte, on ne reproduit pas, inconsciemment, des modèles qui ne sont pas “trop Français”. L’intérêt de ces réflexions est de se remettre en question nous-mêmes mais aussi ce que les enseignants apprennent et encore comment ils font cela. L’idée de former les professeurs d’une manière dont ils deviennent plus sensibles envers ce sujet et aussi discuter. Cela est un peu comme la rééducation pour les professeurs qu’après ils pourront utiliser en classe pour sensibiliser nous, les étudiants. L’erreur possible de ce changement sera de ne plus faire d’auteur de la France Métropolitaine et que des auteurs de pays étrangers. Il faut trouver un bon équilibre entre les textes Français et les textes étrangers, les différentes époques, et aussi avec les œuvres écrites par les hommes et par les femmes. Après nous pouvons nous demander si en différenciant le département du français en étant trop “colonisé” et le département de langues et littératures en français en étant “décolonisé” cela ressort les différences plus que si ce n’était pas indiqué et peut pousser à la radicalisation. 

Dernièrement, est-ce que le changement de nom a été nécessaire pour le changement d’idéologie dans le département? Comme nous le savons tous, les mots ont du pouvoir et peuvent impacter très fortement une communauté comme la nôtre à l’école. Le changement d’appellation du département est une façon d’affirmer publiquement la manière ouverte de procédé et de pouvoir créer, à travers ce mot, la philosophie du département. La philosophie aurait été là avec ou sans le changement du département, mais c’est le côté symbolique qui compte dans cette situation. Nous nous trouvons dans une autre étape d’éducation du côté des professeurs mais aussi du côté des étudiants. 

Merci beaucoup aux professeurs qui ont participé dans ces interviews, et si vous avez des questions s’il vous plaît contactez nous sur l’instagram (@thelgbexpress). 

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *